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Recrutement : L’obsolescence d’un process

 jobAvant que les gens ne sachent écrire, les CV et consoeurs n’existaient pas vraiment. Tout se passait lors d’un entretien d’embauche où, en quelques minutes et après quelques brèves questions, le verdict tombait.

Qu’en est-il aujourd’hui ? On fabrique un beau CV, si possible selon la coloration donnée par l’annonce en mettant plus ou moins en avant ce que le recruteur recherche. Puis, dans un catalogue de lettre de motivation, on copie-colle ce que l’on pense le plus approprié. Et enfin, on envoie le tout par internet.

Après une bonne centaine de CV envoyés, vous aurez peut être la chance d’être convoqué à un entretien d’embauche où il vous faudra être le plus naturel possible en fonction du poste recherché. Pour cela, vous aurez suivi quelques stages à ce propos.

A quoi joue-t-on ? Au chat et à la souris, direz-vous, mais quel est le résultat final ? Un malaise des deux côtés qui broie le rechercheur d’emploi et qui exaspère l’employeur potentiel. Tout cela sonne faux parce que, d’un côté comme de l’autre, on s’oppose, parce que des rancoeurs se sont accumulées.

L’un dit qu’on le traite comme un numéro, un moins que rien puisque sur 100 propositions, il ne reçoit que quelques réponses généralement laconiques et tellement bidons qu’il ne croit pas un traître mot de ce qu’il y a d’écrit. Il sent que l’on se fout de sa gueule à plein nez et puis pour ceux qui n’ont pas répondu, le mépris est affiché totalement.

Les employeurs répondront que ce n’est pas vrai, qu’ils recherchent les pépites et qu’ils sont submergés par les courriers, tant ils ont si peu de temps à leur consacrer. Alors ils informatisent, pondent des procédures pour rationaliser, ce qui ne fait qu’empirer la « froideur » du recrutement.

L’un ne peut travailler sans l’autre, les deux parties ont besoin de faire cause commune mais les liens du mariage (les contrats) se font de plus en plus à coup de législation, de droits impossibles qui les rend prisonniers l’un de l’autre. On ne sait plus très bien qui est l’otage de l’autre tant l’amour-haine s’amplifie.

Est-ce propice à l’augmentation du rendement, à l’harmonie des relations, à l’épanouissement des personnes concernées ? Que nenni ! Sous des couverts de politesse, de sourires commerciaux entendus, ils se supportent car ils savent qu’ils n’ont pas le choix.

Si l’on faisait un « vrai » sondage sur le sujet, il apparaitrait que beaucoup voudraient aller voir ailleurs, changer d’air ou se refaire une santé professionnelle en faisant ce qu’ils aiment vraiment faire.

Mais le marché du travail est tendu, les employeurs serrent la vis et les plateformes d’emploi ne cessent de grossir. Mr Dupont, vous n’êtes que quelques lignes dans une base de données, rien de plus. Les plateformes d’emploi vous marchandent au même titre qu’un paquet de pâte où votre CV sert de papier d’emballage.

Alors ne soyez pas étonné si l’on vous traite comme une marchandise, surtout si vous n’êtes pas de la bonne couleur, que la date de validité n’est pas trop proche et qu’enfin vous ne faites pas de petits.

La société de surconsommation a fait que la rencontre des futurs mariés n’est plus vraiment humaine. Les temps ont changé et l’employeur doit maintenant faire face à une multitude de contraintes qui le fatiguent et l’exaspèrent. Dois-je embaucher, dois-je grandir en France ou dois-je me rabattre sur l’existant en attendant la retraite ?

Quand la contrainte devient plus pénible que le plaisir retiré alors la fatigue et le découragement menacent. Pourquoi faut-il que je me défonce pour les autres, pour ceux qui ne pensent qu’aux WE, aux RTT et à leurs droits au bonheur d’être peinard.

Pourquoi moi, simple entrepreneur, dois-je en supporter tout le poids alors que l’on croit depuis trop longtemps que je m’en mets plein les fouilles ? Est-ce que mon salaire vaut que je me défonce comme cela ? Non, je crois qu’il faut que je rentre dans la masse et j’irai voter pour celui qui m’en promet le plus.

Après tout, pourquoi serais-je responsable quand la majorité s’en fout ? Pourquoi continuerais-je à mettre en jeu tout ce que j’ai acquis tandis que tous les autres se la jouent perso ?

Je comprends maintenant pourquoi l’état veut favoriser l’entreprenariat. Il a compris que c’est grâce à des milliers, voire des millions, de gogo comme moi qu’il peut continuer à vivre au-dessus de ses moyens et pondre des règlements histoire de s’occuper et de répondre au malaise social.

Mon Dieu, où est passé l’envie de construire un monde meilleur, un monde plus juste ? Où est passé le rêve de la nation ? A la trappe, tout simplement à la trappe, car on ne pourra jamais revenir en arrière tant le contentieux est important et les rancunes tenaces.

Même si vous avez l’idée d’atteindre la retraite pour en finir avec ce monde du travail totalement décalé, le montant de votre retraite vous fera comprendre que vous avez bossé toute votre vie pour des clopinettes. Il vous faudra même vous remettre sur le marché du travail mais là on vous attendra au passage de nouveau.

On est cuit de toute manière, le système est construit pour cela. Nous ne sommes que des bêtes de somme pour engraisser des circuits monétaires qui se gavent à n’en plus finir. Il y aura de plus en plus de pauvres pour une minorité de très très riches.

Je vois que l’égalité et la fraternité jouent à plein pour les pauvres et puis la même chose pour les riches mais surtout ne mélangeons pas, cela serait injuste n’est-ce pas ?

Laurent DUREAU

Article paru à l’origine sur le blog Booster Votre Influence le 26 avril 2007 et réactualisé sur le blog 345D le 13 avril 2012.

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