Serait-il possible d’imaginer un monde civilisé où le pompier, l’ambulancier ou le SAMU n’existerait pas ? La notion d’urgence suite à catastrophe, accident ou autre, dérange chacun d’entre-nous car cela rappelle la mort. Pourtant l’urgentiste est le plus fervent défenseur de la vie. Il s’y donne à fond, jour et nuit, pour être au service d’autrui même au péril de sa vie.
Dans mon intitulé professionnel de Serial Entrepreneur Consultant Urgentiste Impulseur, on me demande du bout des lèvres la signification d’urgentiste. Je réponds alors par une autre question : Qu’avez-vous ressenti à la lecture ou à l’écoute de ce mot ?
Puis, ce qui était une appréhension devient un véritable cafouillis de mots peu clairs tant il est difficile pour la personne de cerner pourquoi cette réaction bizarre, si profonde et si lointaine à la fois, que cela lui semble venir du fin fond des âges du temps où elle jouait avec Mathusalem dans le bac à sable des Dieux.
Après quelques minutes, le mental et l’analyse ayant repris ses droits, la vision s’éclaircit et la raison gagne dans toute sa splendeur. Ce qui semblait être le diable est en fait un ange qui vous veut du bien. Exit donc toute peur sur l’urgentiste, mais il y a encore un hic !
Si l’urgentiste est là, c’est parce qu’il y a eu un imprévu pouvant entraîner la mort et la kyrielle de souffrances associées. Enfin, voilà donc ce qui fait que le mot urgentiste a cette connotation négative en presque tous.
Il nous est si inconfortable d’avouer notre impuissance à maîtriser la vie et les évènements que cela nous est insupportable.
Notre personnalité nous crie si fort notre invincibilité, notre infaillibilité, que la moindre entaille nous fait hurler de douleur. Cette souffrance nous semble si intolérable que même la main qui peut vous sauver la vie est presque une insulte à votre ego.
Pourtant dans les faits, nous hurlerions à la mort si les pompiers, le SAMU ou l’ambulance n’arrivaient que le lendemain ou jamais.
Nous ferions des révolutions violentes et destructrices afin de signaler notre mécontentement. Nous clamerions même que cela est totalement inhumain de ne pouvoir prêter secours à une personne en danger ou à ses biens personnels.
Nous aurions le sentiment d’une telle impuissance devant les évènements que même la force de se battre nous abandonnerait. Le fatalisme deviendrait notre raison d’être, traînant avec elle son irréductible et indéfectible amie qu’est la pauvreté.
Alors, reconnaissons que l’urgentiste est :
- un signe d’évolution certaine vers un mieux être
- un signe d’espoir au maintien de la vie
- un dévouement remarquable souvent salué par sa bravoure
- un acte désintéressé au service de la vie
- une nécessité vitale pour la civilisation humaine
et désamorçons parallèlement :
- ces peurs ancestrales de la mort
- ces refus de notre infaillibilité humaine
- cette dictature de l’absolu divin dans ce monde si relatif
L’entreprise, à titre de personne morale, suit les mêmes lois qu’un être humain. Elle peut tomber malade, se casser une jambe, avoir de la fièvre et il faudrait que ses dirigeants comprennent et qu’ils désamorcent en eux les trois points précédemment cités.
Le médecin d’organisation urgentiste agit sur une entreprise (le corps) qui possède des organes fonctionnels (les départements ou services) afin de soigner des cellules (les hommes).
Du traitement homéopathique à la chirurgie lourde, tout est mis en oeuvre pour sauver le patient. Sur le moment, il peut ne pas aimer ce que vous lui faites mais toujours après, il vous remerciera d’avoir fait ce que vous avez fait !
Dans le cas contraire, si vous ne faites rien parce que sur le moment il ne veut pas « avoir mal », il sera handicapé et vous poursuivra au tribunal pour incompétence et irresponsabilité. En cas de mort, vous aurez ses proches et héritiers qui réclameront des dommages et intérêts pour douleur morale…
Etre urgentiste est un chemin de croix où la contradiction, le paradoxal et l’incongru se côtoient allègrement. Puis d’un revers de main, toutes les contradictions mentales sont balayées quand vous savez que vous avez agi juste, au moment juste pour la juste cause au bénéfice de votre patient…
Laurent DUREAU
Article paru à l’origine sur le blog Booster Votre Influence le 12 octobre 2006 et réactualisé sur le blog 345D le 15 mars 2012.