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Management 7 : Le Sensemaking

7_managementIl est étonnant qu’au XXIème siècle, on redécouvre des fondamentaux tellement fondamentaux que j’oscille entre pleurer tant la décadence est grande et l’espoir que nous avons enfin touché le fond.

Sous des noms anglais flairant l’étude scientifique ayant pris des années, pour ne pas dire des décennies, on continue de nous assener des vérités que le premier illettré de la campagne profonde d’un pays en voie de développement serait capable de vous lâcher sans réfléchir.

Derrière ce mot du sensemaking (fabriquer ou donner du sens), on nous fait découvrir que si l’on veut qu’une personne s’implique ou donne le meilleur d’elle-même, il faut donner du sens à l’action qu’on lui demande de faire.

Je me rappelle, j’avais 6 ans quand mon père me fit comprendre cette première notion. A l’époque, noyé dans un champ de vigne immense pour moi, il me demanda d’ôter les sarments de vigne qu’il venait de tailler des fils de fer.

Pour stimuler mon ardeur, il promit de m’offrir un billet
de 5 francs, soit l’équivalent aujourd’hui de 0,76 €. Alors pendant une journée entière, je me suis esquinté les doigts à défaire tous ses serpentins qui s’étaient enroulés autour des fils de fer rouillés.

J’y ai mis toute mon ardeur, sans compter
, car ce que je faisais avait du sens. J’allais pouvoir m’acheter des bonbons. Bien que j’en avais marre, j’ai persévéré malgré mes pensées divergentes et l’envie de jouer à tout sauf à arracher ses queues de cochon..

Je me suis inventé des jeux avec ces serpentins. Chaque sarment arraché, c’était comme libérer la vigne d’une branche morte devenue inutile. Je parlais tout seul et chaque pied de vigne devenait mon ami car j’étais devenu son sauveur. J’étais pleinement convaincu que ce que je faisais était bien.

J’ai tenu une journée entière, sans broncher, car en mon for intérieur je voulais aussi montrer à mon père qu’il pouvait être fier de moi. Et puis quand vint l’heure de partir, de remonter sur le porte-bagage de la mobylette et d’étreindre la taille de mon père de mes petits bras pour ne pas tomber tout en écartant les jambes suffisamment pour ne pas me les prendre dans les rayons de la roue arrière, j’attendis qu’il me donnât ce précieux billet de 5 francs.

J’épiais ses moindres mouvements, ses moindres mots telle une rivière assoiffé en plein Sahara. Je le vis ranger ses outils dans la cabane de misère, allumer une gitane, refermer la porte du champ qui était ceinturé d’un mur de pierres délabrées, me poser la main sur la tête en guise de remerciement puis démarrer la mobylette avant que je saute dessus. Arrivé à la maison, j’attendis mon obole qui ne vint jamais… et cela fut ma première injustice salariale.

Avec le recul, cette simple journée m’a démontré :
1 – que l’on pouvait stimuler n’importe qui en donnant du sens à l’action qu’on lui demande de faire avec une carotte à l’appui.
2 – que l’action doit être bénéfique autant pour le faiseur que pour tous
3 – qu’un compliment fait toujours du bien quand l’action est finie
4 – qu’une promesse non tenue est la pire chose pour torpiller une bonne volonté.

Transposez cela auprès de vos collaborateurs et vous saurez l’essentiel pour être un bon manager. Point besoin d’aller faire un MBA ou de vous justifier d’étude d’éminents psychologues américains car cet enseignement est valable pour tout être humain quelles que soient sa langue et sa culture natale.

Pour donner ou redonner le goût de l’engagement au travail de vos collaborateurs :
– Ne faites pas des promesses que vous ne pourrez pas tenir
– Expliquez leur les avantages qu’ils retireront de l’action à mener et en quoi elle bénéficiera à tous
– Reconnaissez le travail accompli par des compliments sincères.

Fort de ces quelques règles aussi fondamentales que la respiration, vous deviendrez un chef reconnu pour son équité et son respect de la nature humaine.

C’est simple mais les consultants en mal de revenus tenteront de vous convaincre du contraire. Aujourd’hui le bon sens coûte très cher en consulting car nous n’osons croire que se cachent en nous des trésors de sagesse enfouis sous des tonnes de peurs et de préjugés distillés par des penseurs que vous pensez plus intelligents que vous.

Laurent DUREAU

Article paru à l’origine sur le blog Booster Votre Influence le 27 mars 2007 et réactualisé sur le blog 345D le 18 février 2012 .

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