Bourré d’énergie et plein de bonnes intentions, l’entrepreneur surtout s’il est novice va vite apprendre à ses dépens que tout ce qu’on lui dit n’est pas à prendre au pied de la lettre.
Dans ce parcours inhabituel, chaque acteur voulant vous aider est convaincu de la justesse de ses propos et vous, en bon élève, vous allez gober quelques couleuvres qui vous donneront soucis et tracas avant leur complète évacuation de votre univers.
Eh bien oui, aussi convaincu et convaincant que peut être votre donneur d’infos, il vous faudra systématiquement détecter le bon du mauvais, le vrai du probable afin de mesurer les risques que vous prenez.
L’info sera toujours « teintée » commercialement par votre interlocuteur qui a intérêt à faire du business avec vous. Ceux qui sont « agréés » du type experts-comptables, juristes ou banquiers sont les plus redoutables car forcément, d’une manière ou d’une autre, ils vous tiennent par les « précieuses ». Pour eux, vous n’êtes qu’un poisson rouge coincé dans un aquarium.
Pour les autres « conseillers » de tous poils, naturellement on est plus chatouilleux et il est plus facile de détecter les dérives qui pourraient nous nuire. Cependant, il y a des professionnels très aguerris qui apparaissent et disparaissent de votre champ de vision à la vitesse de la lumière, juste le temps de commettre leur larcin.
Personnellement, je les range dans la catégorie des PV de stationnement. Malgré tous vos efforts pour ne pas en prendre un, statistiquement vous savez qu’il vous faut y consacrer un certain budget mensuel avec lequel vous vous arrangerez.
Là où le discernement devient le plus vital, c’est quand il faudra signer un contrat vous engageant. Cela va de la signature d’un CDI, d’une assurance ou d’un contrat de partenariat.
Plus l’écriture du contrat est petite, ou le pavé important, et plus cela indique que les mailles du filet sont fines et que vos capacités à vous en sortir seront quasiment nulles. Généralement le ticket de sortie coûte très cher, mais entre cela et l’abattoir, mieux vaut perdre une jambe ou un bras…
Reste l’embauche d’un salarié, la signature avec un partenaire ou associé et le « contrat du siècle ». Dans ces derniers cas, l’insouciant se fait immédiatement immoler, l’innocent crucifier et le malentendant écarteler.
Tous les pontes du management de pacotille vous diront qu’il faut étudier la chose, l’analyser et après mûre réflexion prendre la décision. C’est effectivement un bon conseil, mais il est loin de se suffire à lui-même.
L’expérience montre que notre première impression à propos d’une personne est l’une des clés capitales qui forgeront votre décision. Certes, c’est peu rationnel, voire pas du tout, mais cela marche.
Un vieux de la vieille n’a pas besoin de trois jours pour se faire une idée sur quelqu’un ou sur un contrat juteux. Au premier ressenti bizarre, inhabituel, sa vigilance s’éveillera et il cherchera qu’est-ce qui a provoqué en lui cette alerte.
Avec un brin d’expérience, la chose est entendue mais il lui faudra vaincre la puissance de persuasion de son mental. Il se dira cette personne présente bien, son CV est impeccable, ses recommandations sont élogieuses et pourtant quelque chose le dérange…
A chaque fois que j’ai hésité et que j’ai décidé d’écouter ma logique, je me suis pris une veste. Il est en nous un « instinct », un « ressenti », une « sensation » qui est là pour nous aider à survivre en ce monde.
Si vous ne ressentez pas un projet, une affaire, un futur associé, ne vous engagez pas et restez courtois. Dites-vous que cela n’est pas pour vous et que d’autres en profiteront à votre place.
Votre capacité de discernement sera votre armure sur le champ de bataille où tous les coups sont permis. Alors, soyez bon enfant dans vos rencontres, dans votre business, mais n’oubliez pas que vous êtes un joli petit poisson rouge au milieu d’une meute de chats affamés.
L’expérience la plus frappante que j’ai eue dans ma vie a été la suivante. Un beau jour, mon père arriva à la maison avec un plein filet de poissons qu’il venait de pêcher avec mon frère. Fier comme des coqs, ma mère les envoya balader en leur disant qu’ils les cuisinent eux-mêmes. Humiliés devant la flopée de frangines, ils décidèrent de prendre les choses en main et m’appelèrent à la rescousse pour qu’on se la joue entre « mecs ».
Choses dites choses faites, on se retrouve à trois autour de la table avec une poêlée d’œufs de barbillon fricassés aux petits oignons. Mon père commença à servir mon frère aîné, comme il se doit, et puis voulu me servir. A cet instant, ma petite voix me dit de ne pas en prendre et je m’évertuais à dire à mon père que je n’en voulais pas.
Vexé, il se servit quand même en maugréant contre ce fils qui ne savait pas apprécier les bonnes choses. Ils n’eurent pas le temps de terminer l’assiette qu’ils devinrent blancs comme des cachous avant de se mettre à vomir de tout leur estomac.
Pris de panique j’ai appelé du renfort car ils étaient presque évanouis. Mon frère allongé sur le lit se teintait d’un couleur verte et était secoué par de violents spasmes. Dans la demi-heure ils étaient à l’hôpital pour cause d’empoisonnement aigüe. S’ils avaient fini leur assiette, ils auraient été morts ce jour-là.
J’avais 14 ans et j’avais eu le courage de dire non à mon père, malgré une ambiance propice à resserrer les liens entre nous. Croyez-moi, depuis ce jour-là, j’ai compris qu’il y avait en moi quelqu’un qui me voulait du bien et encore aujourd’hui et plus que jamais je l’écoute très attentivement.
Je vous souhaite donc un maximum de discernement dans vos affaires et la vie de tous les jours tout en sachant que votre petite voix parle faiblement comparé à la fanfare de notre mental.
Laurent DUREAU
Article paru à l’origine sur le blog Booster Votre Influence le 22 mai 2007 et réactualisé sur le blog 345D le 19 février2012.
Article suivant: Management 12 – Le Lâcher prise
Article précédent: Management 10 – La Ténacité
(1 commentaire)
kamala
19 février 2012 à 9 h 43 min (UTC 2) Lier vers ce commentaire
Oui ! quelle richesse de » La » reconnaitre ! nous avons un corps merveilleusement équipé toutes les pièces sont ajustées et cerise sur le gateau … on nous a donné LA CLEF ! mais quelle » goinfrerie » de vouloir toujours en rajouter de l exterieure ! dans chaque entrée ! alors qu il suffisait tout » SIMPLEMENT » de L écouter ! de s arreter ! de La poser ! oui mais voilà … on ne l a croyais pas ! on ne l a choisisais pas ! et là quelle chute ( la deuxième et bien réelle ! ) il faut parfois bien des années pour enfin s y retourner tout penaud de l avoir si peu valoriser.
Merci Laurent cela parait etre un cours du préparatoire mais quelle nécessité de revenir à la base de notre construction ! c est le premier pas à faire vers ELLE ! et surtout Merci de préciser que le discernement est encore plus redoutable à maintenir lorsque en face il y a l affect.
( j ai l impression d etre pendant les grandes vacances à faire mon cahier de devoirs au début on s apllique et l on applique ! ). Bises à tous mes camarades du cours préparatoire et rendez à la récré pour partager un gouter.