Nous avons vu, lors du précédent article, que l’indécision est l’une des pires choses qui peut arriver à tout être humain, particulièrement s’il a une fonction de management. Nous savons que la vie n’est, en réalité, que prise de décision. Sans décision, sans choix, la vie n’existe tout simplement pas.
Nous vivons dans un monde de dualité afin d’expérimenter entre un côté ou un autre jusqu’au jour où l’on découvre la troisième voie : celle du recul qui permet de voir l’ensemble comme un et indivisible. L’indécision est l’aînée de la famille et nous allons maintenant aborder son petit frère…
Alors, quelle est la couleur des yeux de celui qui se cache derrière cette indécision ? Il est facile à découvrir si l’on se pose les bonnes questions car l’être humain est une personne qui se doit de communiquer pour vivre.
Alors avant de parler, de prendre une décision, il lui faudra écouter, entendre, ressentir une énergie, une information qui peut se montrer sous forme d’odeur, de toucher, de pression, de regards, de comportement, de paroles, d’écrits, de films, de musique, etc…
Le 2ème membre de la famille s’appelle donc : Déficit d’écoute.
C’est vrai, pris dans toutes nos activités, tous nos centres d’intérêts et tous nos besoins personnels, le déficit d’écoute non seulement nous enferme dans nos convictions, nos croyances, notre art de vivre mais aussi dans une « mollesse » décisionnelle.
C’est vrai que dans un premier temps, cette mollesse décisionnelle ne nous semble pas valable car on est persuadé que nous prenons toujours des décisions. C’est vrai mais la vraie question concerne la portée de nos décisions !
Décider ce que l’on va manger ce midi ne requiert que peu d’engagement par rapport aux autres et à nous-mêmes. Ce genre de décision relève plus de l’automatisme, de l’habitude et rarement du courage.
Par contre, écouter les autres, leurs idées, leurs revendications, leurs propositions d’améliorations nous amènera forcément dans une zone moins « sécurisée » et remettra en cause bien souvent un mode de comportement managérial qui se doit d’évoluer.
L’une des composantes du courage managérial est de reconnaître qu’il ne faut pas faire la sourde oreille à ce que l’on ne veut pas voir, entendre ou traiter. Cela est un acte d’engagement afin que le changement puisse survenir ou apparaître.
Nous sommes dans un milieu en perpétuel mouvement et il est donc normal de devoir s’adapter et d’être ainsi confronté à des nouvelles situations demandant une décision. L’incertitude fait partie du monde managérial alors l’esquiver ne fait que renforcer l’image que vous n’êtes plus tout à fait le chef de la situation.
Le déficit d’écoute est d’abord un déficit d’attention au monde qui nous entoure.
Je comprends que l’individualisme et le renfermement des individus de notre société sont de plus en plus grands mais ce n’est pas une raison valable pour ignorer de plus en plus ceux qui sont dans notre entourage qu’il soit professionnel ou non.
Ne plus écouter les autres, ne plus leur porter attention, c’est tout bonnement renier leur existence, leur intelligence et leur unicité. C’est une autre manière de dire, tu n’existes pas non seulement dans ma tête mais surtout dans mon coeur.
Souvent, les gens disent que le contraire de l’amour c’est la haine. Eh bien, c’est tout simplement faux ! La preuve est simple. Qu’est-ce qui vous fait le plus mal au fin fond de vous : la haine ou l’indifférence ?
Si personne ne vous répond quand vous dites bonjour, si personne ne vous remarque quand vous êtes là, si personne ne vous porte attention, si tout le monde fuit votre regard, dites-moi combien de temps allez-vous tenir ?
L’indifférence tue littéralement l’être humain dans son coeur alors que la haine ne peut tuer que le corps. Quand vous avez la haine pour quelqu’un, vous pensez à lui, vous le portez en votre coeur mais d’une façon négative.
C’est cette négativité qui peut nous sembler dangereuse mais vous savez au moins que quelqu’un vous porte attention ! Et souvent, il arrive qu’il y ait des réconciliations car l’amour peut éteindre toute négativité mais ne peut rien faire contre l’indifférence.
Le déficit d’écoute, c’est d’un côté un signe d’enfermement sur soi-même (avec toutes les plus ou moins bonnes raisons du monde) mais c’est aussi dire littéralement aux autres : « Tu ne m’intéresses pas ». Ce qui laisse toutes les interprétations possibles pour ceux qui se sentent exclus de votre univers.
Alors le déficit d’écoute, dans le contexte du courage managérial, est une plaie dont il faut se tenir éloigné le plus possible. Ouvrez les écoutilles, passez un temps raisonnable à entendre, voir, communiquer avec vos collaborateurs.
Ainsi vous démontrerez qu’ils existent pour vous et qu’ils sont donc importants pour le bon fonctionnement de votre entreprise. Les écouter, c’est leur dire « je t’aime » d’une manière simple sans avoir à le dire et ils feront de même en retour même s’ils ne sont pas d’accord sur votre dernier refus concernant leur augmentation de salaire.
Le coeur prend toujours le dessus sur le mental alors ne croyez pas qu’en gérant les gens comme des pions, vous en ferez des collaborateurs heureux de travailler pour votre entreprise. Ils ne donneront le meilleur que si vous les écoutez.
Alors maintenant, posez-vous la question et faites un rapide audit de tous ceux que vous évitez, de tous ceux dont vous ne connaissez même pas le prénom voire le nom, de tous ceux qui pourraient faire beaucoup plus et qui se retiennent.
Le management est un mot qui veut tout dire et rien dire à l’image des mots liberté, amour, fraternité, équité, etc. Ce sont des mots étendards qui contiennent tout et leur contraire.et qu’il est bien d’utiliser politiquement pour rassembler avec le même discours les deux factions opposées.
On peut bien sûr vous apprendre des choses dans les écoles de management mais, somme toute, ce sera par votre attitude que vous arriverez à gérer les personnes dont vous avez la responsabilité.
Aucune technique, aussi brillante soit-elle, ne vous viendra à l’esprit à la vitesse de l’éclair pour répondre à un bonjour, un sourire ou un regard. A ce niveau, vous ne pouvez rien calculer mais seulement être vous, être véritable.
Tout délai anormalement long indiquera à votre interlocuteur que soit vous pédalez dans la semoule parce que vous avez fumé un joint, soit que le repas d’affaire a été trop chargé ou que vous essayez de le manipuler. Si vous cumulez les 3, il va falloir vous attendre à quelques séances de torpillage dans l’estime que l’on vous porte.
Et puis bien sûr, il y a les surdoués du mensonge, ou du paraître, qui pourront éventuellement s’en sortir honorablement dans l’instant mais ils se feront quand même avoir un jour ou l’autre. Cela pourra jouer avec les nouveaux venus mais les anciens sont déjà au parfum depuis longtemps.
En résumé, vous n’avez pas vraiment le choix si vous voulez être à la hauteur ! Il vous faut être tout simplement vous-même mais avec cette volonté d’écoute qui indiquera que vous désirez communiquer avec votre prochain car, in fine, vous avez compris que sans les autres vous n’êtes rien.
Laurent DUREAU
Article paru à l’origine sur le blog Booster Votre Influence le 13 mai 2008 et réactualisé sur le blog 345D le 26 février 2012.
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