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Et la formation DIF dans tout ça ? (2)

dif3Comme promis lors du précédent billet, je vais aborder d’une façon plus pragmatique ce qui se cache derrière ce fameux DIF dont on parle de plus en plus. C’est comme un serpent de mer, tout le monde en parle mais personne ne l’a vu !

Cela n’est pas vraiment surprenant car c’est un outil qui a été voté par l’ancien gouvernement afin d’aider « le travailleur » à s’ajuster au marché du travail. On pourrait presque dire que c’est le « 35h » de la formation.

 

Il en a presque les mêmes caractéristiques. Il a été imposé par la votation où le gouvernement d’alors et les syndicats se sont mis d’accord pour faire payer l’entreprise. Au départ, cela se voulait être une entente partagée afin d’aider les « travailleurs » à affronter l’inéluctable que l’on appelle aujourd’hui la flexisécurité..

Le seul hic dans l’affaire est que l’État n’avait pas vraiment bouclé le sujet concernant l’ardoise à régler. On est resté assez flou tout en disant que l’entreprise devrait en payer une bonne partie ainsi que les régions.

C’est connu depuis longue date en France : On discute, on vote et après on verra pour les modalités financières. Il est évident que l’esprit « politique » du court terme cherchant à plaire à un électorat se fout un peu, pour ne pas dire carrément, des ardoises futures. Au final, ceux qui se retrouvent à mettre la main au panier sont systématiquement les entreprises, ces mal-aimées du capitalisme !

Arriva donc ce qui arriva : On traîne les pieds un maximum en attendant qu’un évènement X ou Y viennent à faire voter une autre loi abrogeant la première. C’est de bonne guerre, sauf que le vent n’a pas tourné et je dirais même qu’il s’est renforcé considérablement et dans le même sens.

Alors, c’est quoi le DIF en résumé ? C’est un droit acquis par chaque personne ayant un bulletin de salaire, que vous soyez dans un groupe, une PME ou le seul employé d’un magasin. Personne n’y échappe, y compris les fonctionnaires ! C’est pour dire que l’on ne rigole pas avec le sujet.

Afin de ne pas répéter l’erreur des 35H, il y a eu négociation avec chaque branche professionnelle ce qui a donné des accords de branche. Ces accords viennent souvent rajouter des facilités par rapport au texte de base de la loi. Et puis enfin, le règlement intérieur de l’entreprise peut aussi en rajouter une seconde couche mais toujours à l’avantage du salarié.

En gros, cela donne que chaque salarié acquiert un droit à 20H de formation par an qu’il peut cumuler sur 6 ans au maximum, soit un total de 120H. Initialement, ces formations se passent en dehors des heures de travail et sont rémunérées à hauteur de 50% du tarif horaire du travailleur.

La totalité des frais est à la charge de l’entreprise (déplacement, frais de repas, formation, supports de cours). Toutes les dépenses effectuées par l’entreprise sont exonérées des charges sociales et ne sont pas considérées comme des avantages en nature.

En clair, les employés n’auront pas à payer d’impôts supplémentaires sur les sommes touchées et sur les formations suivies. Si par contre les formations se font pendant les heures de travail, il n’y a pas de rémunération supplémentaire ou de dégrèvement pour les impôts.

Le texte de loi étant apparu en mai 2004 puis entériné en 2005, chaque employé a accumulé 80H de formation au 1er janvier 2008, sauf modulation par rapport aux accords de branche.

En effet certains accords de branche prévoient 25H par an, d’autres 21H mais la loi de base en impose 20 à minima. Le droit acquis est proportionnel au temps de présence du salarié au sein de l’entreprise. Si vous êtes à temps partiel, un prorata est calculé.

Si cela ne fait qu’un an que vous êtes dans l’entreprise, vous n’aurez droit qu’à 20H car avant le dernier changement intervenu le mois dernier, chaque salarié perdait son DIF quand il quittait l’entreprise mais maintenant ce n’est plus le cas.

La demande de stage doit se faire par le salarié et non imposé par l’entreprise. Quand un stage est imposé par l’entreprise, cela veut dire que c’est un stage dans le cadre de la formation continue, pendant les heures de travail et non un DIF.

La grande majorité des dirigeants et cadres d’entreprise ont assimilé le DIF à la formation continue. C’est une grave erreur en termes de management et d’organisation car la finalité n’est pas du tout la même.

C’est pourquoi nombre d’entre eux vont se mordre les doigts dans les 2 ans à venir. Ils ont pris des décisions un peu « à la va-vite » qui malheureusement vont leur coûter cher, je dirais même très cher. Cela explique aussi pourquoi ils jouent à l’autruche pour l’instant mais dans 2 ans, les carottes seront cuites.

En effet au 1er janvier 2010, chaque salarié aura cumulé le maximum possible soit 120H car après cela veut dire qu’il offre au « patron » ses 3 jours de formation par an qu’il ne pourra ajouter à son compteur. En gros, c’est comme pour les jours de congés payés que vous ne prenez pas avant l’échéance fixée. C’est tout bonus pour l’entreprise.

C’est aussi l’une des raisons pourquoi les syndicats se sont montrés jusqu’à maintenant très discrets sur le DIF. Ils attendent que les compteurs soient au taquet pour contraindre l’entreprise, en temps voulu, à reconnaître leur présence et leur utilité !

L’autre chose importante est que l’entreprise a 1 mois pour répondre à la demande de stage par l’employé. Sans réponse de l’entreprise après 1 mois, la demande est considérée comme acceptée !

De plus, l’employé peut choisir des stages qui n’ont aucun lien avec l’activité de l’entreprise. Vous voulez devenir moniteur de ski alors que vous êtes magasinier dans un supermarché, pas de problème ! Ce sera juste une histoire d’explications à donner.

Le DIF apporte avec lui aussi d’autres droits comme celui de demander un bilan de compétence, de bénéficier d’une VAE (Validation des Acquis de l’Expérience), de contrats de professionnalisation ou encore d’entretien professionnel.

Ces derniers entretiens qui doivent au moins se dérouler tous les 2 ans ne sont pas du tout des entretiens annuels comme vous pourriez le penser. Cela n’a rien à voir. L’un concerne vos résultats par rapport à des objectifs fixés par l’entreprise alors que l’entretien professionnel concerne votre employabilité présente ou future.

Pour être plus précis et plus direct, pendant l’entretien professionnel, c’est vous qui dites ce que vous voulez et comment vous voyez votre futur dans ou à l’extérieur de l’entreprise. Et c’est alors à l’entreprise de faire le nécessaire pour faire coïncider vos désirs aux siens.

L’entretien annuel, quant à lui, c’est l’inverse. C’est le N+1 qui vous dit ce que l’entreprise va faire de vous en fonction des résultats obtenus. Globalement vous êtes à la place de l’accusé alors que dans l’entretien professionnel c’est vous qui êtes le juge.

Alors quand j’entends les « directions » dire qu’elles feront les deux entretiens en même temps, on peut comprendre leur incompréhension. Mais ce qui est pire c’est quand elles affirment qu’elles font déjà des entretiens annuels et que cela suffit, cela démontre qu’elles se foutent complètement de vos droits à vous maintenir employable.

D’un côté c’est déplorable, mais d’un autre je les comprends. C’est un 35h bis qu’on leur a mis sur le dos sans leur demander si elles étaient capables d’encaisser les coûts supplémentaires ainsi que l’organisation qui va avec.

L’autre hic concerne le changement de mentalité nécessaire pour faire passer un employé « passif » dépendant du bon vouloir de son entreprise en un responsable « entrepreneur » de sa vie.

Le défi est grand mais pas impossible. Cela semble commun pour un « cadre » qui gère sa carrière mais allez demander au « peuple » de ne plus dépendre d’un patron, d’une entreprise ou des offres d’emplois, là c’est plus difficile.

Personnellement je pense que chacun a à coeur d’avoir une vie professionnelle épanouissante mais des efforts sont nécessaires afin de s’adapter à ce monde qui bouge si vite maintenant. C’en est fini du travail à vie, de l’Etat protecteur et du patronat exploiteur.

Maintenant chacun doit se lever (lève-toi et marche) afin de montrer et démontrer qu’il n’y a personne supérieur ou inférieur à quiconque. Mais seulement des individus uniques qui désirent oeuvrer à la construction d’un monde meilleur (et différent de celui d’aujourd’hui).

Laurent DUREAU

Article paru à l’origine sur le blog Booster Votre Influence le 4 février 2008 et réactualisé sur le blog 345D le 30 mars 2012.

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