Lors d’une étude menée sur les 100 plus gros crashs de ses 5 dernières années, 2 professeurs genevois reçoivent une distinction américaine. En résumé, l’entreprise éclatera si les 3 éléments suivants sont réunis :
1 – le dirigeant est exagérément ambitieux (souvent auréolé par la presse et avec des cadres le vénérant)
2 – la croissance est démesurée (principalement par une folie de rachats de sociétés externes)
3 – le changement est perpétuel
Voyons maintenant cela plus en détails et y ajoutant d’autres commentaires.
Cette étude a été faite sur les plus gros crashs, mais elle est totalement transposable pour les petites et moyennes structures.
Le 1er point démontre qu’une ambition démesurée tue non seulement l’entreprise mais aussi la personne elle-même. 70% des dirigeants sont en situation d’épuisement (burn out) et les 30% restant subissent un vieillissement précoce.
Cette ambition, légitime au départ, devient démesurée car l’environnement du dirigeant le porte aux nues. A l’extérieur, les journaux parlent beaucoup de lui et l’encensent un maximum pour ses performances, son génie, son charisme, lui prêtant ainsi une réputation à flatter anormalement un ego déjà bien prononcé.
A l’intérieur de l’entreprise, son équipe lui est totalement dévouée et lui voue un culte sans partage. Souvent un surnom lui est donné indiquant précisément son style : « le tueur », « l’intrépide », « le génie », « l’empereur », « le Napoléon », etc. ce qui a pour résultat une déconnexion lente et progressive de la réalité « vraie ».
Cela amène que l’entreprise est totalement aux mains du dirigeant auréolé. Cette concentration de pouvoir dans les mains (et les rêves) d’un seul homme sera fatale à l’entreprise.
Le second point qui découle du premier est de vouloir grandir trop vite, aussi bien en interne qu’en externe. La trésorerie va souffrir, l’endettement va anormalement grandir pour arriver finalement au clash.
Et le troisième point découlant du second est que le système n’arrive pas à ingurgiter cette croissance folle. Ce changement perpétuel fera que plus personne ne comprendra ce qui se passe. Le manque de temps pour l’absorption, l’adaptation et la transformation du système fera que sa stabilité ira en s’amenuisant. Ce phénomène est connu sous le nom de fuite en avant. Cela est OK de prendre des risques en accélérant à la fin d’un virage un peu trop serré, mais la succession des virages entraînera irrémédiablement une sortie de route si la distance entre chaque virage est insuffisante pour stabiliser le véhicule.
Maintenant regardons une autre étude faite auprès des entreprises ayant été en situation de crash.
50% des entreprises ont été entraînées par une chute brutale de leur CA souvent par la perte d’un gros client ou par un retournement de marché.
Suite à des gros impayés (ou du CA manquant), l’entreprise se trouve en défaillance financière. En conséquence, l’augmentation de son BFR (Besoin en Fond de Roulement) épuise ses liquidités et le dirigeant se retrouve en position difficile face à son banquier.
L’étude montre qu’un banquier sur trois va suivre l’entreprise dans ses besoins, alors que les deux autres vont au contraire aggraver la situation en durcissant leur position (suppression d’encours, blocage des demandes de crédit, etc.).
Plusieurs points sont donc à retenir :
1 – Si votre banquier vous suit, c’est que vous êtes sur la bonne voie et qu’une fois la situation assainie vous pourrez retourner le voir pour demander plus. A ses yeux, vous êtes une pépite et il gagne bien sa vie avec vous. Vous pouvez donc être assuré que vous n’avez pas obtenu les meilleurs taux ou découverts…
2 – Si votre banquier vous crucifie, cela indique qu’il n’a nulle confiance en vous (et encore moins dans votre business). Si par miracle vous vous en sortez vivant, alors courez chez son concurrent le plus direct tout en restant chez lui. Son chef ne comprendra pas la baisse du CA, l’obligeant ainsi à vous faire de meilleures offres pour vous garder. Cela vous profitera ainsi doublement en présentant les conditions obtenues auprès de votre nouvelle banque qui s’empressera de s’aligner pour piquer le maximum de CA à son concurrent.
Grâce à cet accident de parcours et une fois la chose réglée, un sentiment de bien-être vous envahira. L’idée que les loups se bouffent entre eux à votre avantage est réconfortant et cela surpassera le sentiment de s’être fait tondre la laine sur le dos si grassement quand tout allait bien.
De toute façon, soyez sans crainte sur votre cas car sans moutons, les loups n’existeraient pas…
Laurent DUREAU
Article paru à l’origine sur le blog Booster Votre Influence le 28 novembre 2006 et réactualisé sur le blog 345D le 8 mars 2012.